BlaBlaCar, Criteo (suite)

Publié le par Jacques SAMELA.

BlaBlaCar, Criteo (suite)
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Vus et lus dans Les Echos du 31/01/18, du 14/02/18, et du 07/04/18, et Le Monde du 01/02/18
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Blablacar, un malaise passager ?

Par Jérôme Lefilliâtre — 29 mars 2018 / Libération

Concurrence des «cars Macron*», internationalisation laborieuse, cadres sur le départ… La start-up de covoiturage fait face à de nombreux défis. Un nouvel algorithme, qui affine la recherche des utilisateurs, vise à inverser la tendance.

Le petit monde de la French Tech est beaucoup plus vachard que «l’esprit start-up» de base est censé l’exiger. Depuis des mois, dans les incubateurs, les afterworks et les ateliers d’entrepreneurs, une rumeur affolée court : la déroute de Blablacar, la boîte qui a popularisé le covoiturage au pays du TER, est proche. L’une des grandes vitrines du numérique hexagonal, déjà repeinte en «licorne» (entreprise valant un milliard d’euros) et future multinationale tricolore, au patron (Frédéric Mazzella) adoré des médias, est en panne sèche.

Le chiffre d’affaires est en berne, l’équilibre financier toujours lointain et la direction stratégique fluctuante. «Ils sont en train de se péter la gueule», souffle, sous couvert d’anonymat, un homme au cœur des réseaux numériques français, pas mécontent de voir pâlir cette étoile un peu trop arrogante à son goût. «Ils ont un problème de relais de croissance», tempère un entrepreneur qui connaît bien les cofondateurs. «Problème de relais de croissance» : pour une start-up, dont le modèle ontologique repose sur l’augmentation rapide et permanente des revenus, au mépris des pertes financières, cela équivaut à une petite mort.

Il y a des signes qui ne trompent pas. Ces deux dernières années, les rêves d’expansion internationale de Blablacar, qui revendique 60 millions d’utilisateurs dans le monde (dont 18 millions ont été réellement actifs au dernier trimestre 2017), ont connu un réveil brutal.

Au Brésil et en Russie, le service de covoiturage marche très bien, mais il ne produit aucun chiffre d’affaires. L’entreprise, qui n’a pas osé s’attaquer au juteux marché nord-américain, réfléchit à la meilleure façon de faire payer les millions d’utilisateurs. Le système de commission appliqué en France n’est en effet pas toujours exportable.

Quant à la Grande-Bretagne, l’Inde, le Mexique et la Turquie, la start-up a dû se retirer de ces territoires, faute de succès. Une offre y est toujours active, mais les équipes locales ont été supprimées.

Pique-nique

Conséquence directe, au siège parisien, de nombreux employés qui travaillaient à l’internationalisation ont quitté la start-up. Depuis le début de l’année dernière, les départs se comptent en dizaines, pour un effectif estimé aujourd’hui à 350 personnes.

Blablacar réduit la voilure, confirme une ancienne de la communication de la boîte. Les managers se sont séparés de salariés peu motivés, qui étaient venus pour le nom plus que pour le projet. Certains se sont fait sortir parce qu’ils n’étaient pas bons.

Fait significatif : des cadres de haut rang, comme le vice-président aux finances ou le patron de «l’architecture» informatique, ont aussi pris leurs distances. D’après nos informations, une vingtaine se sont fait la malle en 2017, activant au passage leurs bons de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE), un mécanisme d’intéressement dont tous les salariés de Blablacar bénéficient.

Beaucoup ont rejoint d’autres start-up, à la recherche de l’hypercroissance que ne connaît plus Blablacar depuis trois ans. Dernier événement qui témoigne de la crise : en juin 2017, Frédéric Mazzella, incarnation de la boîte depuis sa création en 2006, a transmis la direction opérationnelle à un autre confondateur, Nicolas Brusson, ne gardant lui-même que la présidence du conseil d’administration. «Qu’un fondateur de start-up prenne du recul n’est jamais bon signe. Normalement, il s’accroche au-delà du raisonnable», relève un très gros «venture capitalist» (investisseur) français.

Ce dernier trouve étrange que les patrons de Blablacar soient si mystérieux dès que l’on aborde le sujet des revenus de l’entreprise : «Une start-up cache son niveau de rentabilité. Mais elle communique toujours son chiffre d’affaires si elle en est fière. C’est l’indicateur de sa bonne santé !»

Et si Blablacar était malade ?

Au siège parisien, Frédéric Mazzella et Nicolas Brusson reçoivent en tandem, dans le «Blabla village», la salle commune de la start-up, au vague look d’aire d’autoroute avec ses tables à pique-nique et son bar.

Sans nier les difficultés à l’international, les deux hommes martèlent que le Brésil et la Russie connaissent des progressions d’usage phénoménales et que l’activité européenne, en Pologne, en Allemagne et ailleurs, se développe.

En 2017, le chiffre d’affaires de l’entreprise a continué de croître, jurent-ils, et «les pertes, inférieures à 10 millions d’euros, se sont réduites». Mais le coup de frein a été réel à cause de l’inertie du marché français, qui représente encore la moitié des revenus. «Pour la France, 2017 a été une année plate», admet Brusson. La libéralisation, à l’été 2015, des dessertes nationales par autocars - les fameux «cars Macron», qui relient les grandes villes à très bas prix - a fait beaucoup de mal à Blablacar. De même que la montée en puissance des liaisons low-cost Ouigo de la SNCF.

Granularité plus fine

Soudainement, le covoiturage n’a plus forcément été la solution de transport la plus économique pour aller de Paris à Lyon ou de Nantes à Bordeaux. «En vingt-quatre mois, la France, marché le moins concurrentiel au monde, est devenue le plus concurrentiel, résume Frédéric Mazzella.

Sur les grands axes, on se partage un gâteau qui n’a pas grandi aussi vite que le nombre d’acteurs. La guerre des prix est irrationnelle.

D’ailleurs, Blablacar perd moins d’argent globalement que n’importe quelle compagnie d’autocars.» C’est un comble : lorsqu’il était ministre de l’Economie, le président de la «start-up nation», Emmanuel Macron, a pris une décision qui a fragilisé l’une des jeunes entreprises innovantes les mieux assises de France… Partie en fin d’année de la boîte, l’ex-vice-présidente à la croissance et aux produits, Cyrielle Callot, «optimiste» sur la capacité de rebond de l’équipe, reprend l’argument de la concurrence. Mais ajoute : «On a mis du temps à réagir aux bus. On était un peu dans notre zone de confort.»

Défiée sur le transport longue distance, son cœur d’activité, Blablacar a essayé de trouver de la croissance sur le covoiturage courte distance, c’est-à-dire les trajets domicile-travail.

Une application dédiée, Blablalines, a été lancée l’an dernier, mais elle n’a pas fait un carton. Sur ce créneau, la concurrence est vive, portée notamment par le service IDvroom de la SNCF. «Le business de la courte distance est très complexe, prévient un autre rival, Julien Honnart, patron de Klaxit.

Blablacar a choisi une stratégie grand public sur quelques lignes. Nous pensons qu’il faut passer par les entreprises en créant des réseaux autour d’elles. C’est le bon modèle. Nous avons quatre ans d’avance.» Sur la courte distance, Mazzella et Brusson n’affichent pas d’ambitions : «On teste le produit, on ne l’a pas poussé.»

Pour repartir de l’avant, ils ont préféré se concentrer sur une modification technique de l’offre longue distance. Un nouvel algorithme, progressivement déployé, guide les recherches des utilisateurs depuis janvier.

Les dirigeants promettent une granularité plus fine, multipliant les points de contact de proximité, quand l’ancien Blablacar permettait surtout de relier des nœuds de centre-ville. Le moteur de recherche rénové ne propose plus seulement aux usagers des véhicules faisant peu ou prou le même trajet qu’eux, mais tous ceux qui empruntent une partie de leur itinéraire ou passent à proximité et sont prêts à faire un léger détour.

C’est ainsi que, pour aller ce samedi de Paris à Cabourg (Calvados), il était possible (selon une recherche effectuée jeudi, offrant 65 transports différents) de monter avec un certain «Jean-Yves», qui rallie lui-même Saint-Lô (Manche) depuis Choisy-le-Roi (Val-de-Marne). Prix : 21,50 euros par personne, dont 3 euros de frais pour Blablacar.

«Récemment, j’ai testé le nouvel algo entre Arzon (Morbihan) et Alençon (Orne), raconte Nicolas Brusson. J’ai trois sièges dans ma voiture, mais j’ai transporté cinq personnes en tout au cours du voyage. Ça m’a rapporté 115 euros.»

«Deux millisecondes»

Présenté comme ça, on a envie d’y croire. Blablacar espère démontrer les bienfaits de cet algorithme pendant la longue grève à la SNCF, attendue à partir de la semaine prochaine. Et surcommunique sur ce thème depuis quelques jours. «Notre force est notre communauté et notre capacité à relier les petites villes, argumente Frédéric Mazzella, faconde très assurée. C’est une histoire de maillage.

Les voitures vont partout, pas les bus ni les trains. Le nouvel algo nous permet de comprendre par où passent les conducteurs. La difficulté est de calculer cela sur des millions de trajets en deux millisecondes. Notre produit contient désormais beaucoup plus d’intelligence de géolocalisation.»

Hurler à la mort de Blablacar est certainement prématuré. D’autant que la boîte a beaucoup d’argent en réserve, donc de quoi voir venir. Au temps de sa splendeur, en 2014-2015, elle a levé 300 millions de dollars (environ 240 millions d’euros) auprès d’investisseurs français et internationaux. «Il nous en reste un peu moins de la moitié, révèle le directeur général. On a des années et des années devant nous.»

Certes, mais elle continue à perdre de l’argent, douze ans après sa création… «Il faut réexpliquer ce qu’est une start-up, réagit Mazzella au quart de tour. "Perte" est un mot qui s’applique aux sociétés matures. Pour une start-up, on ne doit pas parler de "perte" mais "d’investissement". Le négatif reflète cette ambition. Et notre potentiel de croissance. Nous ne sommes pas encore arrivés.» Charge au nouvel algorithme d’emmener Blablacar à destination.

*Cars Macron : la guerre des trois

Le transport en car n’est pas encore une affaire rentable, mais en tout cas en croissance. En 2017, 7,1 millions de voyageurs ont préféré le bus, soit 15 % de plus qu’en 2016. Le chiffre d’affaires du secteur, libéralisé par Emmanuel Macron lorsqu’il était ministre des Finances, a progressé de 26 %. En revanche, la concurrence est loin d’être pléthorique, puisque seuls trois opérateurs nationaux, Ouibus, Flixbus et Eurolines, se partagent un marché évalué à 105,4 millions d’euros en 2017. Pour conquérir des parts, les transporteurs se livrent à une guerre des prix qui confine à la vente à perte. Sur la seule année 2017, la recette au kilomètre, mètre étalon de cette activité, a reculé de 30 centimes, pour s’établir à 4,6 euros pour 100 km parcourus. Afin de limiter la casse, les trois compagnies de bus ont également rationalisé leur offre en développant des lignes plus courtes. La distance moyenne parcourue a baissé de 75 km en un an. Les liaisons les plus fréquentées au quatrième trimestre 2017 étaient Lille-Paris, Aéroport de Lyon-Grenoble, Paris-Rouen et Grenoble-Lyon. On est loin des 4 000 km de la route 66 sur les bus américains de la compagnie Greyhound…

 

. Pour encore plus d'informations, n'hésitez-pas à lire ou relire l'article du 22 janvier 2015, intitulé: Blablacar, en voiture tout le monde.

Jean-Baptiste Rudelle rappelé au poste de directeur général de Criteo

Jean-Baptiste Rudelle, président et co-fondateur de Criteo, le spécialiste français du reciblage publicitaire, reprend son poste de directeur général après l’avoir quitté en décembre 2015 pour laisser la place à Éric Eichmann.

L’annonce a été faite par l’entreprise via un communiqué. La prise de fonction est immédiate. Jean-Baptiste Rudelle va opérer depuis le siège social de Criteo à Paris. De son côté, Éric Eichmann va assurer la transition et quitte le conseil d’administration.

« Accompagner la prochaine phase de croissance de l’entreprise »

« Le conseil d’administration a demandé au fondateur de Criteo de jouer un rôle plus actif pour aider l’entreprise dans sa prochaine phase de croissance. En conséquence, Éric Eichmann a choisi de quitter Criteo. Et ce dernier a proposé d’accompagner cette transition en agissant en tant que conseiller du directeur général », déclare Jim Warner, administrateur indépendant principal, dans le communiqué.

À l’époque, Jean-Baptiste Rudelle avait quitté la direction opérationnelle de l’entreprise pour se consacrer à la stratégie à long terme de l’entreprise. Depuis, il a également créé la start-up less.com, spécialisée dans le covoiturage urbain instantané.

Bientôt l’annonce des résultats du 1er trimestre

L’entreprise cotée au Nasdaq rencontre des difficultés depuis qu’Apple a introduit en septembre 2017 un système qui restreint lourdement le suivi publicitaire sur Safari via les cookies. Or, les données obtenues grâce à ces fameux «cookies» constituent le cœur d’activité de Criteo. En décembre, l’entreprise a même vécu un véritable « jeudi noir » et a vu son cours chuter de plus de 20 %. L’entreprise prévoit une baisse de 22 % de son chiffre d’affaires en 2018.

La société a déjà commencé à se diversifier en proposant notamment des outils à destination des e-commerçants.

Criteo annoncera ses résultats pour le premier trimestre 2018 le 2 mai.

. Pour plus d'informations sur Criteo, n'hésitez-pas à lire ou à relire le dossier du 19 février 2013, intitulé : Criteo, le rêve américain.

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